Mohamed Hossein Bahaoui, Portrait d’un Monument Discret...

Le 09/08/2022

Mohamed Hossein Bahaoui, Portrait d’un Monument Discret...

  • Par Mohamed Moubarak Ryan ,
  • Maroc Echecs le mercredi 29 mars 2006 & 19 Juillet 2007.


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A soixante treize ans , Si Mohamed Hossein Soussi Bahaoui reste toujours le modèle de l’homme discret et serein, des qualités qui font très rares dans ces « temps modernes ». Chaque jour, selon un rythme qui semble inscrit dans ses gènes, on peut le côtoyer à sa place habituelle au Cercle l’Union ; Il est souvent entrain d’analyser une partie d’échecs tirée du périodique espagnol El Pais, ou tout simplement de contempler d’autres joueurs, intervenant parfois pour suggérer une suite gagnante, mais ne jouant que très rarement.

C’est dans ce "bastion" du jeu d’échecs au Nord du Maroc, lieu incontournable pour tous les amateurs d’échecs de Tétouan ou venus d’ailleurs, que le jeune adhérant Mohamed Hossein Soussi Bahaoui devait s’initier aux délices du noble jeu, vers la fin 1960 ou les débuts de 1961. Ce fut l’amorce d’une passion qui devait l’emporter très loin dans l’espace échiquéen marocain et qui reste, 45 ans après, toujours vivace.

Si Bahaoui va faire valoir rapidement ses talents de joueur positionnel et rationnel, et s’imposer surtout grâce à son sens de l’organisation et sa propension pour le travail minutieux et bien fait. Il se chargea aussitôt du Secrétariat Général de l’Association Marocaine des Echecs, (Al Haia Maghrebia)) ; Il fut parmi la délégation de Tétouan prenant part à la création de la Fédération Royale Marocaine des Echecs, (Fes 2&3 novembre 1963). Il assura le secrétariat administratif de cette jeune instance à deux reprises : la première lorsqu’elle élit siège à Tétouan, de 1965 à 1969 ; la deuxième de 1975 à 1981. Avec Feu Bakkali, il fera un couple efficace, concrétisant des idées qui étaient à de longueurs d’avance sur la réalité des échecs marocains à l’époque : Bakkali avec sa fougue, son expérience échiquéenne à haut niveau et son audace ; et Monsieur Bahaoui avec ses compétences administrative et technique, sa discrétion et sa réserve naturelles. C’est ainsi que le premier Championnat Individuel National verra le jour en juillet 1965 à Tétouan ; D’autres compétitions importantes vont lui succéder portant l’empreinte de si Bahaoui. Pourtant, celui-ci ne délaissait guère le jeu de compétition, car il a pris part à deux championnats individuels ( le 2° en 1968 et le 3° en 1968), avec des résultats moyens, participé aux olympiades de Lugano (Suisse 1968) et à la rencontre internationale Maroco-portugaise à Portimao à la même année.

Il continuait durant une bonne dizaine d’années à disputer au sein de son club les championnats et les compétitions nationales par équipes jusqu’à 1976, année oú il a pris part à la Contre Olympiade organisée par la Jamahiria de Libye. Il se consacrera, par la suite, presque exclusivement aux volets historique et technique du noble jeu, et s’adonnera à d’autres passions compatibles avec ses merveilleux dons de collectionneur. Il entamait dès ces débuts son projet monumental de mémoriser, cataloguer et rédiger l’histoire en marche de la FRME ; Son œuvre est devenue au fil des temps la seule référence crédible et valable pour note mémoire échiquéenne commune. Malheureusement, la première instance concernée n’a jamais voulu sérieusement éditer cet important ouvrage, objet pourtant une recommandation explicite d’une récente Assemblée Générale.

Mais Monsieur Bahaoui, malgré ses ressources financières limitées, celles d’un professeur qui vivait essentiellement de son salaire, jadis,d’enseignant en histoire géographie, et proviseur d’un lycée avant de prendre sa retraite , n’a pas attendu quelconque subvention pour publier , en 1972, son premier ouvrage intitulé : « Chadharat Mina Chatranje » (fragments du jeu d’échecs). Il fera date dans l’histoire de la littérature échiquéenne, nationale, puisqu’il est considéré comme le premier livre imprimé sur les échecs au Maroc. En 1981 Si Bahaoui, publia - cette fois sous l’égide de la Fédération- son pamphlet sur les « règlements du jeu d’échecs et les méthodes d’organisation de ses tournois » qui sera également le premier en son genre sur le plan arabe ! Il se distingue également en étant l’auteur d’un article fort intéressant dans la fameuse et (sérieuse)« Encyclopédie du Maroc » sur le « Mouvement échiquéen au Maroc, Hier et aujourd’hui » ( Voir Maâlamat Al Maghreb, Tome 16, 2002)

Ses écrits journalistiques, quoique occasionnels furent toujours précis et bien documentés ; Déjà en 1968 il publiait des chroniques d’échecs dans les journaux Al Alam et le quotidien ’officiel Al Anbaa. Actuellement il écrit régulièrement des articles concernant son autre passion, la botanique et les plantes médicinales, dans les pages du périodique régional TAMUDA. Il s’agit d’extraits d’un ouvrage relatif à cette discipline qui est encore manuscrit en attendant un futur éditeur !

Mais la passion qui semble prendre maintenant le dessus sur toutes les autres est la philatélie, dont Si Bahaoui dispose de collections inestimables concernant notamment le Maroc et l’Egypte, sans oublier, bien sûr, sa très belle collection de timbres d’échecs, que les participants à la 4° Coupe de Chefchaouen ont eu le plaisir d’apprécier. Outre ces activités savantes et raffinées, Ce personnage érudit reste un grand calligraphe, bien dans la lignée de sa famille connue pour ce don inné. Il a contribué à coté de son frère aîné feu Ahmed Bahaoui à calligraphier « Al Moshaf Al Hassani » parrainé par Feu Hassan II. Il publie de temps en temps quelques recueils des meilleures œuvres arabes dans Tamuda. IL a même entamé une expérience en sa qualité d’enseignant de la calligraphie au célèbre Institut National des Beaux Arts de Tétouan en 1997.

Toutes ces formidables facettes de la personnalité de Si Bahaoui sont méconnues de la plupart des échéphiles marocains, qui évoquent surtout l’image de l’Arbitre International intègre, rigoureux, compétent et courtois : Le Doyen ; celui qui a contribué à la formation de nombreux arbitres et cadres techniques nationaux à travers divers stages organisés par la FRME, et notamment le premier qui eut lieu en 1982 à Fes, le deuxième stage national en 1983 à Tétouan, et le troisième en 1990 à El Jadida ; Tous ceux qui ont participé dans les compétitions nationales organisées de 1965 à 1986 ne peuvent dissimuler la sérénité et la quiétude qui découlent de la présence de Si Bahaoui au sein de tout staff technique. Notre premier Arbitre International Marocain ( titre discerné par le FIDE en 1981) reste le modèle par excellence de tous les arbitres qui méritent et respectent les charges qu’ils assument.

Quant aux autres activités parallèles : conférences, expositions, tables rondes, qui touchent tous ses domaines de prédilection : Echecs, Calligraphie, Philatélie, botanique et plantes médicinales, il serait difficile d’énumérer toutes ses participations à Tétouan comme à travers les diverses villes du Royaume.

Si Med Bahaoui demeure toujours Président Honoraire de l’Association Marocaine des Echecs titre symbolique qu’il porte depuis 1974 ;.Il a reçu plusieurs distinctions dont celui de l’Association des Amis de la Presse Sportive en 2001.La FRME lui a rendu hommage à deux reprises : en 1988, à Fes, à l’occasion du 25° anniversaire de sa création, oú si Bahaoui en sa qualité de SG de l’Association la Colombe Blanche de la philatélie fut derrière l’oblitération d’un timbre postal commémorant l’événement ; et en 2002 à Tétouan à l’occasion du 1° Festival National des Echecs de l’Enfant.

De tels hommages sont louables mais à caractère symbolique ; La meilleure façon de pérenniser l’œuvre de Si Bahaoui est d’éditer le plus rapidement possible son ouvrage monumental sur l’Histoire des Echecs au Maroc

 

Maroc Echecs 2006